dimanche 28 octobre 2007

Du cinéma à Paname et ailleurs

La période cinéma a recommencé en entrant de nouveau dans la période hivernale. A la belle saison je suis tentée par d'autres activités, mais l'hiver arrivant et ce jusqu'aux prochains beaux jours, je deviens alors une cinéphile hebdomadairement sollicitée soit par le cinéma en salle, soit par le cinéma à la maison. Cela devient une nécessité pour créer une coupure efficace et une distance avec l'univers professionnel dont j'ai besoin de me distancer efficacement au moins une fois par semaine. Dernièrement donc, j'ai vu deux films très différents mais qui ont retenu mon attention.

Photo de mhaleph : Le miroir aveugle


Le premier, réalisé par Nicolas Klotz à partir du livre de
François Emmanuel La Question Humaine est un film austère mais fascinant qui ne dévoile que progressivement son sujet essentiel, soit dénoncer le broyage humain effectué en silence dans la plus grande indifférence et avec le maximum d'efficacité par les actes et le langage de la grande entreprise (ici S.C.Farb) , et notamment celui de la DRH, qui fonctionne aujourd'hui comme le langage codé employé par les nazis pour mettre en mots atones les procédures qui conduisirent au génocide. Ce parallèle entre le génocide historique et réel qui a eu lieu durant la Seconde Guerre Mondiale et le génocide Industriel quotidiennement perpétré avec la plus grande froideur, était très audacieux et l'équilibre à trouver très délicat pour ne pas tomber dans le scabreux.
Le film évite l'écueil et Mathieu Amalric - qui s'est antérieurement illustré dans Le scaphandre et le papillon de Julian Schnabel - dans le rôle principal d'un psychologue d'entreprise rongé et dérangé par une douloureuse prise de conscience fait le reste. La violence quotidienne qui s'exerce dans le monde des cols blancs est parfois suggérée, parfois montrée sans états d"âme. Toujours présente, larvée ou outrageusement visible, elle révèle que cet univers policé des entreprises est sans cesse à l'âffut de la gangrène et de la prochaine décapitation. Comme un couperet, la question humaine tombe et le malaise s'installe, la folie des limites barre l'horizon.
Le film a fait son travail : pointer "les oublis" contemporains relatifs à l'histoire, pointer "le déni des évidences". Etrange, difficile, glaçant mais percutant avec un chute superbe d'intensité dramatique. Un petit joyau d'une grande finesse, qui justifie tout le film, qui efface toutes nos perplexités.




Le second, est Le dernier voyage du juge Feng de Liu Jie. Pour ce premier long métrage, le réalisateur chinois, ancien directeur de la photographie sur d'autres productions cinématographiques, a délibérément choisi, malgré les risques de censure, d'évoquer la fracture qui existe entre la loi gouvernementale toute puissante dans l'absolu et la loi coutumière et ancestrale propre à chaque localité. D'un côté, la loi pour tous, applicable à tous, symboliquement représentée par l'emblème de la justice transporté avec vénération de village ethnique en village ethnique; de l'autre, la loi du clan et des chefs de villages. .
Au cours de ce voyage haut en couleurs et en micro-rebondissements jusqu' à l'issue tragique, le vieux juge Feng, sa greffière et assistante Tante Yang, le jeune juge An-Luo tout juste sorti de l'Université, vont affronter au quotidien, chacun à leur manière et avec leur propre histoire (malgré la ligne sacro-sainte!), les problèmes de querelles diverses qui amènent les villageois à saisir le tribunal populaire itinérant. Force est de constater, que cette justice "toute puissante" est inopérante sur le terrain de la Chine des confins, celle qui en marge vit encore au temps de la quasi féodalité, celle qui régie par ses propres codes ne peut se plier aisément aux grilles édictées et appliquées par le pouvoir central. C'est ainsi que le juge Feng, implicitement soutenu par Tante Yang, essaie, mais souvent en vain, d'accommoder deux mondes disjoints quitte à enfreindre lui-même la loi.
Pour réaliser ce film, Liu Jie a fait de nombreux voyages dans la province du Yunnan - qui ne comprend pas moins de douze minorités ethniques - au sud-ouest de la Chine et a vécu dans les villages avec les populations locales pour être au plus proche de leurs réalités. Entre fiction et réalité documentaire, ce réalisateur nous offre une vision relative de la notion de justice au travers des différentes situations et des personnages complexes et déjà mutants, cocasses, entêtés, sensibles, parfois pleins de retenue et de pudeur.
J'ai eu grand plaisir à voir ce film et j'attends le second qui portera sur les mutations urbaines de la Chine contemporaine avec intérêt.

jeudi 25 octobre 2007

Un petit tour à Beaubourg n°1



Vidéo de mhaleph : Dead drunk deer in Champagne dreams (1988) de Rebecca Horn (1944)

Aujourd'hui, un petit tour à Beaubourg m'a permis de croiser une installation amusante de Rebecca Horn dans ce grand palais de verre où se perdent les limites de l'intérieur et de l'extérieur. Désormais, chaque mois, une fois par mois, jusqu'en mai 2008, je serai associée à une action culturelle dirigée vers un groupe de jeunes garçons et filles arrivés depuis peu en France. Cette action vise principalement à les familiariser avec l'univers du musée, les notions d'art et de représentation (par qui, comment, pourquoi, etc...), elle vise également à les mettre en contact direct avec la langue par des pratiques orales, par la prise de notes succinctes, par divers travaux et exercices en relations avec les oeuvres et les espaces découverts. Cette action se déroulera sur huit séances de 2h chacune pendant huit mois. Chacune d'elle sera l'occasion de ramener une petite vidéo de circonstance et/ou quelques photos et de les joindre à ce blog.

dimanche 21 octobre 2007

Du domaine du mythe

Ernesto Guevara de la Serna alias Che Guevara ou El Che


Photo de mhaleph à La Havane en 2002

L'objectif n'est pas ici de faire un article supplémentaire sur le célébrissime "Comandante", car en ce moment je n'en ai ni le temps ni le loisir, mais de renvoyer à quelques liens afin de renouer avec cette figure mythique de la déjà lointaine "révolution cubaine" et revisiter ainsi les images souvent fragmentaires qui nous en parviennent.
Je ferai cependant référence, en le citant, à un article de Jorge Aulicino parut dans le Courrier International du 11 au 17 octobre 2007, n°884, qui évoque avec intelligence les images kaléidoscopiques qui ont servi à construire toute une représentation fantasmatique autour de sa dépouille sacralisée. Les uns ont voulu voir dans la photographie de Freddy Albora "La lamentation sur le Christ mort" d'Andrea Mantegna, d'autres ont fait référence à "La leçon d'anatomie" de Rembrandt. A quelques sept années de distance, elle vint se superposer à la non moins célèbre photographie d'Alberto Korda prise en 1960 lors d'un meeting et consacra définitivement le mythe. C'est cette dernière qui sera à l'origine "d'un déferlement d'images dont il n'est pas possible d'établir le contenu et la signification" aujourd'hui. En effet, "des milliers de jeunes qui n'étaient pas nés quand le Che est mort les arborent sur leurs tee-shirts, à même la peau ou sur la lunette arrière de leur voiture - des jeunes qui pourtant ne sont pas socialistes, qui ne le seront jamais et qui ignorent presque tout des idéaux révolutionnaires de Guevara."
Cependant, le personnage mythique, lointain, preux et valeureux comme un chevalier de l'ordre révolutionnaire si mondialement connu, reste un homme, sans doute complexe. Ce qu'il ne manquera pas de rappeler, dit-on, à l'heure de sa mort au sergent Mario Terán venu l'exécuter : "Visez bien, vous allez tuer un homme." Le rideau retombe. Sur un homme? Sur une légende? Sur un demi-dieu?
Voici les liens à suivre :
- Dix controverses sur Che Guevara parues dans Le Monde le 09-10-07
- Un site sur la vie et l'histoire de Che Guevara  :
* Che

lundi 15 octobre 2007

Merveilles vénitiennes

Point de longs discours, point de développements verbeux autour de Venise, mais une photographie. N'est-ce pas une vue inhabituelle de la Sérénissime? Si oui pourquoi? Vous pouvez chercher et répondre si vous voulez ;-)

Photographie de Mariano Fortuny

lundi 1 octobre 2007

Attention Peinture Fraîche



Dans un carnet, j'ai collé le billet d'entrée du Théâtre Le Mery où je suis allée voir la pièce "Attention peinture fraîche" de Lope Velez jouée par Lope Velez dans le rôle unique de Frida Kahlo. Frida en plein déballage dans une gallerie parisienne pense et rêve sa vie et à sa vie (à son semblant de vie) à travers ses toiles qui défilent entre ses mains qui les accrochent et les décrochent tour à tour, à la cadence de ses humeurs... vagabondes. Elle ne se prive pas non plus avec un franc parlé salutaire "de tailler une veste" bien ajustée et bien sentie aux surréalistes ainsi qu'aux intellectuels et aux idéologues de bistrots qui ont les fesses vissées sur leur chaise à longueur de journée. Une prestation en forme de monologue ou de dialogue imaginaire déployant l'éventail de tous les états d'esprits traversés par Frida en proie au mal absolu, à la douleur récurrente, à l'ironie et à la violence verbale les plus cinglantes, aux sentiments humains les plus prosaïques, aux petits bonheurs et aux petits malheurs quotidiens, à ses crises de conscience sur le bien fondé politique de son art, à ses illuminations idéalistes, à ses folies, à ses passions, à ses sagesses et à ses lucidités... malgré tout, malgré Diego Rivera qui la détruit autant que ses plaies jamais refermées. C'est un personnage trouble, profondément émouvant et ambivalent qui prend corps et voix devant nous durant 1h30 d'intensité dramatique. Tout se croise et se percutte en elle. Tout cohabite et tout explose en elle. Tout est vivant et excessif en elle. Comme son désir de mort. Ni sainte ni martyre Frida Kahlo vit sa douleur coupante comme de la "glace" jusqu'à son extrême limite et en meurt.

Photo de mhaleph : Lope Velez dans le rôle de Frida Kahlo, Théâtre Le Méry